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15 mars 2009

Lectures marxistes - Introduction

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Pour reprendre l'écriture de ce blog, il m'a semblé utile d'ouvrir une des seules rubriques prévues à l'origine qui n'aient pas encore été abordées, la lecture critique des « classiques » du marxisme. Par « classiques », on entend ici essentiellement les œuvres de Marx, Engels, Lénine et Trostki, mais d'autres auteurs devraient aussi être abordés.

 

Tous les développements théoriques et les discussions stratégiques menées autour des tâches révolutionnaires ont été menées par des hommes ayant lu ces ouvrages, qui servent d'indispensables références sans lesquels on ne peut souvent prendre la mesure des enjeux. Lire ces textes, c'est assimiler les armes théoriques nécessaires au combat.

 

La méconnaissance et le travestissement de la pensée des théoriciens du marxisme a aussi été, et est toujours la base aussi bien de la critique du marxisme par ses adversaires, que celle des errements opportunistes ou gauchistes. Combattre les premiers, éviter les deuxièmes suppose de revenir sur ces ouvrages, non pour en faire l'éloge ou se contenter de les paraphraser, mais comme outils pour comprendre la situation actuelle et la dynamique fondamentale du marxisme au-delà de ses formes circonstancielles. 

 

Le marxisme n'est pas une idéologie totale et intangible. Irrévocablement lié à l'analyse de l'évolution historique et à l'action politique, il n'a lui-même cessé d'évoluer au gré de son histoire, y compris dans l'œuvre même de ses fondateurs et de ses principaux continuateurs. Expression de la conscience de classe du prolétariat, il s'est sans cesse nourri des expériences concrètes des luttes ouvrières.

 

Ces auteurs ne sont pas des porteurs d'une vérité définitive. Comme tout être humain, et particulièrement lorsqu'il se confronte à la tâche de comprendre le monde, ils se sont parfois trompés. Il leur est arrivé d'ailleurs de vivre des événements qui les ont amenés à le reconnaître, ouvertement ou implicitement. Rarement néanmoins, non qu'ils n'en furent pas conscients, mais qu'ils craignaient l'usage que leurs adversaires pourraient faire de ces auto-critiques. Il n'est qu'à voir comment les staliniens se sont servis de la déclaration de Trotsky, reconnaissant que sur tous ses points de divergence avec Lénine, c'est ce dernier qui avait eu raison, pour comprendre le danger de ce genre de déclaration. Cela rappelle encore que le marxisme reste avant tout une pensée de combat, insérée dans les luttes, et que cela n'est pas sans conséquence, souvent favorable parfois défavorable, sur son développement.

 

Mais la principale raison est que « l'auto-critique » leur apparaissait vraisemblablement dépourvue d'intérêt face à la nécessité d'adapter et de faire évoluer leurs idées lorsque la réalité l'exigeait, (mais jamais pour les adapter à l'environnement idéologique ambiant), ou lorsque le développement de leur pensée et des discussions idéologiques faisaient apparaître des faiblesses, alors même que les fondements du marxisme ne cessaient à leurs yeux d'être confirmé dans les faits.

 

La principale erreur qu'ils firent concernent indiscutablement les rythmes de l'histoire. Marx, Lénine, Trotsky, furent tous convaincus que la révolution socialiste était à portée de main. Plus d'un siècle et demi après le Manifeste, près d'un siècle après octobre, nous n'en sommes toujours pas là.

 

A l'époque où nous nous trouvons, entrés de plain pied dans la crise sans doute la plus grave qu'ait connu le capitalisme, c'est une erreur à ne pas perdre de vue, sans pour autant que la peur de se tromper ne doivent nous entraîner dans une plus grave erreur: ne pas saisir les opportunités qui se présenteront.

 

D'autre part, ces livres sont d'autant moins capables d'apporter telles quelles les réponses aux problèmes actuels que leurs auteurs n'ont pu prévoir tous les développements historiques qui ont suivi leur époque. La réalité sera toujours plus complexe que n'importe quelle théorie.

 

La lecture de ces anciens textes a un autre intérêt: l'époque à laquelle ils furent écrits. Marx et Engels ont développés l'analyse du capitalisme alors que celui-ci se développait dans toute sa crudité, sans fard ni peur, convaincu de son triomphe. L'évolution ultérieure du capitalisme consiste pour une bonne part, à l'exception essentielle de l'impérialisme, à adapter celui-ci face aux variations circonstancielles, et surtout face à la résistance constante des travailleurs. Ces adaptations ont rendu le capitalisme plus complexe, cette complexité masquant les fondements de ce système social que les fondateurs du marxistes ont pu observer en toute clarté, à l'état naissant.

 

Quant à Lénine et Trotsky,  ils ont développés leurs analyses et leurs propositions à une époque inégalée de luttes révolutionnaires dont Octobre n'est que la pointe la plus visible. Ce bouillonnement social et politique engendra une grande richesse idéologique au sein du marxisme. En étudiant leur livres, on ne doit pas perdre de vue qu'ils ne sont pas seulement le produit de la réflexion et de l'action de ces deux auteurs, mais le produit de discussions vives et profondes qui traversaient le marxisme alors, et l'enrichirent. Le rôle jouée par eux dans la révolution tient entre autres, et même essentiellement à leur capacité à intégrer dans leur propre cheminement les analyses d'autres marxistes. 

 

Cette lecture se doit donc d'être critique, non pour jouer au « cherchez l'erreur » cher à nos adversaires et plus encore à ceux qui veulent se justifier d'abandonner partiellement ou totalement le marxisme, mais pour adapter ces textes anciens aux exigences de la lutte présente, et comprendre les risques d'erreurs actuelles. C'est aussi l'occasion de rappeler que, tout en reconnaissant la valeur de ces auteurs, comme dans les organisations celles des militants plus expérimentés ou mieux formés, aucun militant ne doit abandonner une de ses tâches essentielles: se former un esprit indépendant et critique.

 

Ce n'est pas là une concession à l'individualisme, mais une exigence même de la lutte. L'esprit critique et libre de chaque militant est une arme essentielle pour pouvoir adapter la lutte aux circonstances, comme pour éviter les dérives toujours possibles de son organisation. Loin d'être un obstacle à la nécessaire unité dans l'action, il en est une composante essentielle. On l'a dit, le marxisme a évolué et doit continuer d'évoluer en relation avec l'évolution historique et les événements singuliers. Le contenu concret  de cette relation, ce sont les militants. Si ceux-ci se contentent de répéter les formes acquises, le double mouvement entre théorie et pratique se trouve réduit au seul mouvement de la première vers la deuxième. On coupe là les racines mêmes du marxisme, ce qui ne peut conduire à son assèchement. Ce fut là, et ce sera toujours l'une des causes essentielles des échecs.

 

Il est trop tôt pour dire quelle sera la forme prise par ces lectures dans ce blog. La préparation de la première semble montrer qu'elle alternera au gré des articles entre une lecture serrée, avec citations, et des développements extérieurs où l'ouvrage ne sera presque plus que le prétexte pour s'attarder sur des éléments jugés essentiels. Une telle souplesse dans la lecture fera sans doute que ce type d'articles deviendra l'un des axes majeurs du blog.

 

D'ici quelques jours, cette rubrique commencera donc, avec la lecture de l'ouvrage de Trostki  "La révolution permanente".

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